Richesse Tricastine : beauté et pouvoir

Le Musée d’archéologie tricastine propose une exposition exceptionnelle à double titre : par le caractère unique en France et en Europe des collections d’objets extraits des fouilles et par le retour de pièces remarquables, découvertes au 18e et 19e siècles, et « exilés » dans d’autres musées français.

Richesse tricastine présente des objets du quotidien révélateurs du statut social de ceux qui détenaient le pouvoir. La ville révèle ici sa magnificence passée. Car de la préhistoire au Moyen Age, Saint-Paul-Trois-Châteaux, ancien chef lieu romain, conjugue la beauté et la richesse de ses vestiges au superlatif.
Les fouilles, menées régulièrement, ont permis de découvrir des ensembles qui figurent parmi les plus importants de France ou d’Europe. Ainsi la riche collection de parures préhistoriques du site des Iboussières à Malataverne constituée de près de 200 canines de cerfs incisées et peintes à l’ocre, de 1200 coquillages ocrés et de superbes pendeloques en os à décor ; le magnifique pavement en mosaïque de l’époque romaine, un des plus grands d’Europe avec ses 108 m2 ; la collection de verrerie antique du 1er siècle, l’une des plus belles de France, mise à jour dans le quartier du Valladas ; le tabernacle hébraïque médiéval, témoin de la communauté juive installée au 13e siècle, pièce unique en Europe, les autres ayant été détruits pendant les guerres de religion.
D’autres objets, dont certains spectaculaires, sont venus les rejoindre le temps de l’exposition, ou, pour certains, durant quelques mois. Comme un lampadaire de bronze à tête de méduse, une pièce maîtresse, visible jusqu’à la fin juillet avant son retour au musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye, où sont conservés certains des objets du Tricastin (d’autres furent expédiés à Avignon, Metz ou Clermont-Ferrand). Conçu autour de 1860, par la volonté de Napoléon III, pour contribuer à la création d’une identité nationale, ce musée s’est constitué grâce à des achats de collections complètes menés dans la France entière. Pendant que le jacobinisme et le centralisme étatique se construisaient, les régions perdaient alors, en partie, les traces de leur histoire et cette exposition permet aussi d’en prendre conscience.
Richesse tricastine propose la découverte de ce patrimoine exceptionnel grâce à une muséographie inventive et ludique. Ainsi le visiteur, en cherchant lui-même des informations masquées sous un cache – symbole de la démarche archéologique – accède à l’envers d’un décor fastueux qui masque des esclaves travaillant pour un banquet. Ailleurs on peut sentir les épices utilisées jadis ou palper d’authentiques tessons de céramiques. Des dispositifs multimédias, films ou animation vidéo, montrent l’ensemble des pavements antiques ainsi que la dépose et la restauration de la grande mosaïque.

Cécile Mozziconacci, n° juillet/août 2008


Richesse tricastine. Musée d’Archéologie tricastine, place Castellane, Saint-Paul-Trois-Châteaux. Jusqu’au 30 mai 2009. Ouvert du mardi au samedi et le 1er dimanche du mois de 14 h 30 à 18 h. Tarifs : 2,60 euros, réduit : 1,60 euros (étudiants, chômeurs, moins de 18 ans, pass culture), gratuit pour les moins de 12 ans. Visite guidée de l’exposition : 21 euros forfaitaire en plus du droit d’entrée (à partir de 10 personnes). Animations pédagogiques pour les scolaires. Tél. 04 75 04 74 10

L'ECOLE D'AVIGNON MISE A L'HONNEUR AU MUSEE CALVET

Trois nouvelles salles viennent d’ouvrir au rez-de-chaussée du musée Calvet (Avignon). Elles sont consacrées aux artistes venus de France et d’Italie qui, attirés par le foyer culturel que représentait Avignon et par le nombre de commanditaires ont produit des œuvres dans l’ancienne Cité papale, du XVIe au XVIIIe siècle.
La richesse des collections du musée Calvet en fait l’un des tout premiers musées en France, hors Paris. Depuis sa réouverture en 1996, se poursuit le déploiement de ses collections dans l’espace occupé auparavant par la bibliothèque d’Esprit Calvet. C’est ainsi que trois nouvelles salles viennent d’ouvrir, permettant de découvrir ou redécouvrir des artistes majeurs, regroupés sous le nom de « l’Ecole d’Avignon”.

La surprise vient sans nul doute de la découverte des peintures de Simon de Châlons. Né en Champagne, ce peintre est l’un des rares artistes français de la Renaissance à être passé à la postérité. Le musée Calvet a la chance de posséder quatre de ses peintures dont trois sont exposées dans les nouvelles salles. “La Sainte Parenté” (1543) a bénéficié pour l’occasion, d’une restauration complète et singulière. Composé de plusieurs panneaux de bois qui se sont dissociés avec le temps et d’une couche picturale endommagée à plusieurs endroits, le tableau a fait l’objet d’une restauration en retrait, pourrait-on dire, les absences de peinture n’ont pas été reprises, au risque d’être interprétées, mais remplacées par une couche picturale de couleur neutre, ne gênant en rien la lecture d’ensemble de l’œuvre.
“L’Adoration des bergers” est quant à elle, un très bel exemple de l’influence des maîtres flamands sur l’art de Simon de Châlons. Apparentée à “L’Adoration des bergers” peinte par Hugo van der Goes (1483, Les Offices, Florence) pour la famille Portinari, banquiers des Médicis à Gand, cette œuvre s’inspire des maîtres flamands et marque l’influence de l’art toscan. On y voit la Vierge et l’Enfant au centre, à leur gauche Joseph, le bœuf et l’âne et à leur droite Sainte Anne, mère de la Vierge, puis les bergers. La scène est située dans un décor de ruines antiques et non dans une étable à charpente de bois, comme c’était le cas chez Goes et les peintres flamands. L’Enfant, la Vierge, Sainte-Anne et le berger tenant un instrument de musique sont surélevés sur un socle de pierre. L’Enfant Jésus est lui-même posé sur de la paille et un tissu léger, une lumière rayonnante souligne son caractère divin. Les bergers, au nombre de cinq, sont d’expression et d’âge différents. L’âne et le bœuf, peu visibles, fondus dans le décor et l’absence d’une étable à proprement parlé, relèguent au rang d’anecdotique le lieu de l’évènement et mettent en avant le message: le Sauveur est venu pour les Hommes de tous âges et de toutes conditions, les humbles y compris. L’art, et la peinture au premier chef, était destiné, à cette époque, à transmettre aux fidèles le message chrétien.

On appréciera dans les salles suivantes, des œuvres de Nicolas Mignard, artiste majeur de la période baroque et de la Contre-Réforme, celles de ses contemporains et rivaux, Reynaud le Vieux et Pierre Mignard, son frère cadet, dit “le romain”. Pour la période correspondant à la fin du règne de Louis XIV et à la Régence, sont exposées les peintures de Pierre II Mignard, fils de Nicolas et celles de Pierre Parrocel, peintre et graveur, né à Avignon en 1670 et mort à Paris en 1739, peintre issu d’une dynastie d’artistes active en France et en Italie du XVIe au XVIIIe siècle, à laquelle le musée Calvet rendra prochainement hommage.
Olivia Gazzano, n°10 janvier/février 2008

Saint-Rémy-de-Provence: La quintessence de la nature au musée Jouenne




« Je suis avant tout un terrien qui aime le soleil, le vent, la pierre et l’eau. Ma peinture en est imprégnée comme la vie. ». Cette parole de Michel Jouenne pourrait suffire à qualifier sa peinture. Né en 1933, Michel Jouenne est un peintre figuratif qui partage son temps entre Eygalières où il a un atelier construit en pleine garrigue par son fils architecte, Meudon où il possède un autre atelier et ses voyages en France et à travers le monde qui lui procurent des motifs et des sensations qui renouvellent indéfiniment sa peinture. Les eaux de la Camargue, les eaux et les ciels de Bretagne, l’air, l’air présent autour des motifs qu’il peint l’inspirent. Aussi bien au Vietnam qu’à New-York, en Nouvelle-Calédonie qu’à Venise, en Tunisie qu’en Norvège. Son ressenti de la lumière lui est propre et quand il utilise des couleurs vives, du rouge, du jaune, de l’orange, du vert, du bleu et aussi du noir et du blanc, c’est par petites touches juxtaposées et contrastées apportant énormément de vie à ses compositions. La matière, pourtant très présente, s’imprègne sans lourdeur dans la toile, tout en suggestion. Michel Jouenne est un peintre de métier qui a longtemps regardé les grands maîtres, qui en a retiré les leçons de la Peinture et qui trace sa propre voie. Peintre officiel de la Marine nationale depuis 1991, il a le privilège de pouvoir signer d’une ancre ses toiles.
À Saint-Rémy-de-Provence, dans l’ancien couvent des Trinitaires, il a mis a disposition du public une partie de son œuvre, des grands formats dont l’accrochage est régulièrement renouvelé.
Présent dans de nombreuses collections privées, ses peintures à l’huile, lithographies et aquarelles se vendent régulièrement en salles des ventes.

Olivia Gazzano, n°9 novembre/décembre 2007